SUR LFS OTAGES DE DURAZNO DE \ M. BENJAMIN- POUCEL Aux points de vue Éoonomiquo, Maritime, »Coniii)ereial-et Politiqne. Le Bréail daos le Rio-de-la-Plata. Guerrt) au Paraguay. (Qxtrartts c!e la GAZETTE DU MIDI. MARSEIIiLE IMPRU0&JH V" MARIUS OLIVB, RVV. PAKAD1S, 08. 18650M%c 'i Pe ÉTUDE SUR LES OTAGES DE DURAZNO M. BENJAMIN POUCEL Aux points de vuc Éconoinique, Maritime, Comuiércial et Politipe. ( Extraits de la GAZETTE DU MIDI. ) MARSEILLE 'MPRIMERJE V MARIUS OLIVE, RUE PARADIS, 08. 18G5 M IÉTUDE LES OTAGES DE DURAZNO Abx poiflts de vue Eronomíijuc, Maritime. Cowmerrial el Pulil¡i|ue. <*' ;. ( Extraits de la GAZETTE DU MIDI.) 1. Fandis queTAmérique du Nord ténd á se pa- cifier , celle du Sud continué d'étfe troublée par des fonílits auxquels ¡I importerait de meltre un terme, dans l'intérét du commerce general et de l'équilibre politique. On l'a vu hier, par la lettre de Rio-Janeiro que nousavons publice, la guerre se poursuit plus ardente que jamáis enlre le Brésil et la république du Paraguay , soutenue (*) Les Otages de Durazno, Souvenirs du Rio do la Plata pendant l'intervention anglo-francaise de 1845 a 1851, 1 vol. in 8o. — Chez Camoin,"et chez Lebon , libraircs . a Marseille. — A Paria, chez A. Erare, librain- , boulevard Saint-Martin , 43, et chez Herold, libraire, rué de Richelieu, 67.par la Banda Oriéntale. Apres la ville Je Pay- sandu, Montevideo á succombé, á son tour ; les nombreux Francais el Italiens qui résident dans cette derniére ville, el dont les aíTaires sont comí* proraises par les e'vénemens, ne nous permeltcnl pás dédemeurer indiflercns á la continuation des hoslililés. D'autre part, nous royóos l'Espágne, a peine son diflerend avec le Pérou terminé, me- - hacer le Chili, comme allié de la république Pd- ruvienne , et lu¡ demander compte de certains actes malveillans. Une médialion européenne au- ra i l pu et pourrait encoré, en arrétant celte.quc- relle , prevenir une lutte qui serait trop inégale pour que l'orgueil castdlan eút á s'en féliciter. Magueré, les républiques du Sud, alarmées de leur fáiblesse ¡ndividueile, ont tente de s'unir dans une alliance défensive ; ma is la conlerence assembléé a ceteffet n'a eu qué des resultáis tres incomplets; elle n'a pu arréter les dures repre- sa i 1 les de l'Espagne contre les iles Chinchas , el si jamáis les Etals-Unis en venaient aune agression contre le Sud , l'insufiisance de cetle ligue éclalerait bien plus trislement encoré. A tous les points de vue , on ne saurait done Irop e'veiller l'atlention et les sympalhies de l'Europe, mais surtout de notre pays, pour l'ceu- vre de la reconstilution des races latines, pour la défense et la g3rantie de leur inde'pendance , et s'il ttait vrai , comme le disait hier une feuille de Paris . que les Etals-Unis eux-mémes fussenl disposésá proposer, comme principe. I'arbitrag'i des puissances des deux mondes dans les dilTc- rénds susceptibles de troubler encoré la marche de la civilisation , nous ne devrions pas, toul en nous réjouissant de cette heureuse perspeclive, cesser nos eíTor.s pour inléresser l'opinion pur blique au sórt de ees Etals en travail d.'enfante- ment. ■ ■ v K?'>>;-^,:r^.^ $p:x Peu de livres sorít plus instructifs , a cet égard , que celui que nous signalions hier : leu Otages de Durazno, par M. Benjamín Poucel. Ancién colon de TUruguay él fondateur de ber- geries-modéles dans cetle partie du Rio de la Piala , notre honorable compatriote s'était , depuis longtemps , fail connaitre par son zéíe a defendre les ihtéréts' de ees1 bel les cont rees et/Jes établissemens que les Europe'ens pour- raient y former. Les pélilions que , pendant la dictalure de Rosas , il dut adresser aux Cham- bres francaises , pour re'clamer leur protection , y furent l'objets de débats que le Monileur a conserves ; M. Berryer, M. Billaut et d'autres notabilités parlementaires de l'époque, s'en ren- dirent plus d'une fois les inlerme'diaires et les in- terpretes ; M. Poucel fut aussi, a cette occi- sión , en rapport avec des personnages qui dé-6 hutaient alors et qu¡ sont arrivés aujourd'hui auxprcmiers rangs, M. le cotnle Walewski et M. Drou\ n de Lhuys notammení , ptirent apprécier la valcur et la loyaulé de ses renseignemenssur le pays oü il a reside pendant trente années. :Ce sont les fruits de cette longue expériencei qüé l'auteur a déposés , d'abord dans une serie d'ar- licles edites par la Revue de Marseille et de Provence, puis dans le volume dont nous par- lons et qui a paru dans nolre Tille , il y a qnel- ques mois ; ceuvre seríense et vraiment atta- chanle á laquelle les derniers événeraens vierinent donner aujourd'hui un mérite saisissant d'oppor- tunitc. Pendan tlMnterventioriangjo - f rancha jse qui dura de 4 845 á: i 851 ¿ le general Oribe , piéten- danl a la presidence de la république de Monte- video et prolégé par le trop célébre dictateur de Buénos-Ayres, voulut se venger de son impuis- sance sur des résidans francais et anglais , qu'il enleva, au nombre de prés de trois cents, pour les conüner dans la ville de Durazno comrae ólages. M. Poucel se trouvait parmi ees captifs et eut á subir, avec eux , les plus cruels traitemens. Le récit de cette captivité lui a fourni l'occasion de publier une sc'rieuse e'tude du caractére des peuples de la Plata. II ne de'crit pas seulement leurs mceurs et leurs habitudes ; il nous donne des biographies abre'ge'es de leurs notabilités , orateurs, poetes , publicistes , historiens , parmi lesquels s éléve, par son me'rile personnel autant que par ses foncliors, le jeune président déla ré- publique de Bue'nos-Ayres, le ge'néral Barlholo- raé Mitre. Avant d'aborder ce cóté intellectuel et moral de l'ouvragequi, á notre avis, lera le mieux con- naitre les Píatenos , citons d'abord un court ex- trait de la descriplion matérielle des bords de la Platt: :' , ••'»-.''■■ «: Cent quarante mille lieues de superficie sont iributaires sur diversalfluens de ce grand fleuve» pour la part aflórente a la conféderation argenti- ne, y compris jé Paraguay et l'Ürugiiay, el ren- ferment les.térres les plus fértiles du globe. La prairie qui borde les rives droiles du Rió de la Plata et du Paraná, sur une largeur qui varié dé cent á deux cents et méme írois cents lieues, s'étend au sud et a l'ouest du Rio de la Plata, jusqu'au pied des Cordilliéres, en une plaine unie, pre'parée par la nature méme pour étre sillonnée par les voies ferrées, sans le secours de travaux d'arl. Les rives gauches des Rios de la Plata, Uruguay, Paraná et Paraguay qui, tou- tes, sont limitrophes, par le nord , avec l'empire ilu Brésil, comprennent, par ordre géographi- '|ue, du sud au nord, la république de l'Uruguay8 ( Montevideo) , legran-I della luésopolamique connu sous le nom d'Enlrerios, dont li province argentine de Corrientes forme la base, et enfin le Paraguay. Toulesces rives fluviales, d'un déve- loppement de plusieurs milliers de lieues, en comprenant les deux bords de chaqué cóurs d'eau, sont aisément abordables, et promettent á la na- vigation par la vapeur, qui y nait á peine , un accroissemenl successif dont cejle du Mississipi pouvait seule donner une idee , alórs que les Etats-Unis jouisíaient de leur plus grande pros- périté. » G'ést la que vil, sous le clim.it le plus salubre, une population de deux millions á peine, chiffre qui ne donne pas méme quinzéhabitanspar lieue carre'e, tandis.que la Erance en compte i ,700 par lieue, et la Belgíque 2,000 a 2.300; « Ce n'est point á' diré, ajouté l'auteur, que l'inintelligence ou la paresse y trouveraient la •erre promise des fainéans qui iraient dans le but de démolir des montagnes de sucre, et de s'a- Jtreuver a des riviéres de rhum... Non ! la terre il'Amérique est jalouse de sa virginité ; elle ne b livre qu'au travail rude, constant; mais, a cette condition de labeur et de peine, elle recompense largementpar sa fécondité. Voilá le vrai. Du res- te, elle se préle aussi libéralemenl aux humbles voeux du prolétaire qu'aux aspirations de la 9 science qui prepare les grandes entreprises; et •le son sein inépuisable jailliront l'or el l'argent. sous le marteau du mineur, comme le ble qui nailra du sillón de la charrue. » ' L%terrain et ses ressources une fois bien dé- crits, M. Poucel aborde l'histoire et les moeurs des habitans. Nous le suivrons, avec un redou- blement d'intérét, dans ees esquisses pleines de vieetde couleur.10 . Reprenons une fóis encoré, avec l'exccllent ouvrage de notre compatriote , M. Benjamín Poucel (1), le chemhv de rAme'riqne du Sud. A la süite d'un güide si experimenté, nous ne craindrons pas de faire fausse route, et aulant qu'un article de journal peut résumer un volu- me, nous recueillerons dans cette lecture bien des nolions qui nous serviront á juger les éve- nemens accomplis ou ceux qui se préparent dans les deux Ame'riques. M. Poucel s'en est tenu á l'étude des contrées et des populalions de la confédération Argentino, sujet deja trés-vasle , puisqu'il embrasse lout le vaste cours du Rio de la Plata et de ses af- (4) Les Otages de Durazno, un rol. in-8". fluens sur plusieurs milliers de lieues. Les ob- servations de l'auteur sur la race espagnole des Píatenos peuveni, d'ailleurs, s'appliquer á la majeure partie de¿ Américains du Sud, nés de la méme origine. Pour apprécíer sainemeht ün peuple, il faut pénétrer jusqu'au foyer des familles. La seule- mént l óbservateur se rend compte de la forcé inórale et de la na tu re intime d'un pays. C'est la ule d'avoir bien connu le caractére espagnol el sa vigueur seulement assoupie, que Napoleón Ier s'engagea dans cette désastreuse guerre qu'il a si amérement, mais trop tard déplorée sur. son rocher deSainte-Héléne. Et, en effet, l'Espagne de 1808 vaíait miéüx que son gouvernerheht et sés lois. On pourrait aujourd'hui en diré tóut autant des républiques de l-Amérique espagnole, oü la démocratie la píüs large a supplanté trdp brus- (juement le systéme restrictif du régime colo- nial de l'Espagne. Au milieu de leurs discor- des inleslines , elles recélcnt tous les germcs d'une meilleure destinée, et le caractére de leurs habitans , imparlialemenl éludié, proteste contre les injusles dédains de l'Amérique du Nord el de l'Europe méme, tandis que les Etats- Unis ont des mceurs trés-inférieures a leurs bel- les institutioiis. L'événement nons l'a bien prou- vé : quatre ai;s d'affreuse guerre civile ont assez12 revelé tous les vices qui se cachaient soiis la bril- lante suiTace de liberlé donl M. de Tocqueville ful ébloui ; aprés la Démocratie en Amérique qui ne nou; avait fait voir que les grands cotes déla république modéle , les Mémoires de Mis- Iriss Trollope el le román trop liislorique de YOncle Tom se chargérenl de démasquer les co- les prosaiques de ce pays du laisser-faire et du laisser-aller, au;s¡ bien que les passions effrayan- les qué soulevail la question de l'esclavage. Moins puissanles el moins riche?, les rcpubli- ques espagnoles sont. á cerlains degrés, plussai- nes el plus rteuves de 'caractére que les yankees. Si Ton n'y voil pas cet espril avenlureux d'en- Ireprise qui a cree' un si vaste commerce ét une marine marchande rivale de celie des Ánglais, on y trouve, en revanche, ees qualite's primilius d'un peuple cullivateur, ou pl'ulól pasleur, so- bre, robuste, agüe, aussi aple á manier.au besoin, le fusil qu'á jeler le lago sur ses iroupeaux; caractére a la fois ouvert et hospilalier, partout oü les Iroubles civils n'exercent pas immédiatemenl leur tnauvaise influence ; mais au demeurant bonne nature, selon le mol de M. Poucel, qui met la ve'nté au-dessus de tout ressentirnent de sa captivité et de ses souffrances. II dit plus encoré: « l Arnéricain du Sud, ajoute-t-il, est ge'nérale- uieiil doué 4e perspicacilé et d'une facilité d'élo- 43 culion vive, imagéeet origínale, commeles scénes grandioses de la nature de ceslieux. » De tellcs populalions, on le voil, nesonl pas ádédaigner, el malgré l'apathie née d'une vie facile, surtout dans les conlrées du liltoral, il existe la cominc dans l'intérieur une séve forte el vivace. Mais quand l'auteur passe du portrait de I homme a celui de la femme, on reste, comme lui, a la fois saisi et attrislé de voir les Irésors d'intelligence, de gráce, d'amabilité, que l'américaine Platena lient de son origine andalouse et le defaut d'ins- truclion qui laisse le plus souvent ees heureux dons sans culture. « La femme du Rio de la « Plata, » pour emprunter les expressions mé- me de M. Poucel, « est une charmante creation, « d'une expression pétillante d'esprit et de « gracieuseté sans emprunt....... Pour ce qui « est des qualités morales, ello est, dans toulc « l'acception de l'analogie, un véritable dia- « mant recouvert de son enveloppe primitive. « Elle posséde le sentiment du bon , le beau « eleve son espril jusqu'a l'enthousiasme. II y a, • dans ses manieres, un entrain qui plail, mais .< qui tromperait une présomption osee , et il « faut diré en passant que cette affabilité con- « fiante a dé^u plus d'un fat d'oulre-mer. « Elle est éminemment sociable et affable sans « effort, et l'on peut diré que la •ournurc de son■t esprit est aussi altrayante que moélleuse esl '« la désinvolture de ses formes. Elle est, en ge- « néi il, prodigue d'exprcssion, parce qu'elle est « genérense par caraclére. La bienfaisance est «pour elle un ácte naturel, et il se ressent un « peu de la prodigalilé qui lui est propre. » C'est ávec la méme générbsítc que les da- mes de Buénos-Ayres et de Montévidéo , aprés avdir cultivé de leurs mains les arbustes Acuris de leurs jardins. se font un plaisir de prodiguer á lous les viüileurs les bouquets qui sónt leur plus aimable ouvrage ; tous les rapports de so- ciété sont empreints de.ce ráracléré d'hospiialité í¡anche et, pour ainsi diré, frátérnelíe que TEspa- gnol, une fois sorti de sa gravité el dií sa frur Tamour « de l'époux , de l'énfant ou du pére , alteindra « jusqu'au sublime, sans ait, sans effort. Nous « avons vu, de ees exemples qui font croire á de « celestes inspirations , él tont en admirant ees • nobles femmes qui ne se doutent pas de l'hé- « roisme qu'elles possédent, il a fallu gemir sur « l'absence d'une éducalion suffisante qui ren- u drait ees acles, sinon plus fréquens. sans doute « moins nécessaires. En effel, un systéme d'é- a ducation bien enlcndu préparerait une géné- <( ration nouvelle á n'étre plus si fréquemment i exposée aux convubions poliliques, áu milieu « desquelles s'élévent les grands périls qui don- « nent lieu á ees grands dévouemens. » Nous i entrón.- ainsi dans la politique , d'oü les détails de mceurs et de caractére avaient paru nous écarler; mais comme nous le disions au debut, c'e.sldans la famille qu'il faut étudier la nation ; c"est la que réside le secret de la forcé et de l'avenir des peuples. Aprés avoir assez fait connaílre l'aspect du Rio16 de la Plata et la nature morale de ses habitaos. il nous reste a résumer, par un dernier article. lensemble des vuesde l'auleur, dans le remar- quable ouvrage que les circonslances ont rendu si opporlun. 17 III Chaqué paquebot américain nous apporte des nouvelles de plus en plus importantes poür l-'avenir de nos relations pol¡tiques et commer- ciales. Tandisque dans l'Amérique du Nord lesarme'es confédérées posent les armes et que s'ouvre la phase nouvelle qui doit de'cider si les Etats separes seront gouverne's en pays libres, ou si la délivran- ce des noirs sera le pretexte de l'oppression des blancs, le Mexique s'alarme pour lui-méme; Jonhson refuse de se prononcer contre l'enróle- ment de voionlaires ou flibusliers de l'Union en faveur de Juárez. Prés de la , un grand complot de négres est découvert dans l ile espagnole de Cuba ; l istlime de Panamá a sa révolution ; le Pe'rou etle Chili frémissent encoré sous les dures 518 ronditions que l'Espagne leur a imposées : le Pa- raguay, reconstituí en dictature, reprend Jes hos- tililés contre le Brésil, et celuí-ci sooléye, par le lilocus du Paraná, une queslion de libre naviga- tion fluíale qui aflecte tous jes Elats commer- $ans. La Confédéralion argéntine n'est encoré qu'in- direclement impliquée dans celte guerre si mal- beureusement suscitée entre races latines. A cetle occasion, nous allons conlinuer et terniiner l'élude que nous avons entreprise sur ees bellcs conlrées, bases de réquilibre politique et foyer des émigralions fulüres dans rAmérique méri- dionale ; car, si le Mexique doit ene le reraparl conlre les invasions des angloTsaxons, les an- ciennes coloniesespagnoles dansl'autre moitié du ronlinenl sont, pour ainsi diré. le corps méme de la place, le centre de défense de notre race. Le livre de l'honorable II. Poucel (les Ota • ges de Durazno) nous a décrit d'abord la topo- graphie de ees contrées si vastes et si mal peu- plées encoré ; ¡1 a resume, á grands traits, les richesses de ees Ierres vierges et Ies dons ex- ceptionnels dont la Providence les a comble'es : variété de climats depuis le cceur méme de la zóne lorride jusqu'á la limite sud de la zóne tem- pérée ; productions tropicales d'un cote , el de l'autre , récoltes et fruits similaires á ceux de 19 la France ; magnifiques rivieres, loutes navi- gables , déversant les eaux des Cordilliéres et des, chaínés du Nord dans le Rio de la Plata . et aboulissant par ce large fleuve ¡V l'Océan ; reseau fluvial vraimenl unique dans le monde ; car ni le Saint- Laürent "ni"le Mississipi, ni l'Amazone, tout aussi riches d'alfluens, n'en possédent néan- moins qui soient, sur hún - aussi • lóng traje t, propres á la navigation et qui puissent porler dans autant de directions intériéures les navires étrangers, Aucun de ees fleuvesrenommés ri'á aussi le priviiégé excéptiorinel dé la Plata ét de ses iributaires., nous \oulons diré cet heureux paicours á travers deux zónes différentes , qui permel d'unir les deux extremes des répub'iques espagnoles, par la voie de transport á la fois la plus écoñómiqúé ét la plus prompte. Nul autéur avant M. Poucel n'avait encoré fait ressorlir, aux yeux du commerce frangais , ees veriles géographiques trop ne'gligées: car l'Eu- rope semble ne guere connailre de la Plata que le bruit lointain et monotone de ses guerres ci- viles. Ce n'était pas un faible mérile que de ré- sumer en peu de pages , dans un savant laco- nisme, les élémens physiques et les ressources matérielles de ees pays qui offrent un dévelop- pemenlde 140,000 lieues carrees. II existe divers aulres ouvrages qu'il serait injuste d'oublier.et auxquels M. Poucel rend plus de justice que personne. Parmi les plus modernes et les plus inarquans ont peut ciler, par ordre de date i La Confédéraiion Argentine , par M. le barón Du Graty, noble belge, qui a consacré les plus belles a linees de sa vie á étudier le pays et á publier ses proprés observations sur ees conírées, alojs qu'íl íes défendait par la plume et par Te'pée; La Description géographiqueet stalislique de la Cohfédération Afgentiné , par le docleur V. Martin de Mou.ssy, livre doublement utilé áux deux points de vue de son titre , et dont notre trés regrettable collaboraleur M. Henri Abel avait fait un juste éloge; Le Rio dé la Plata , par M. Arcos , un grós volume de fails purement histo- rique, écrit dans lé sens de la démocrálie ; enfin le grand ouvrage de M. Calvo , dont neuf volu- mes ont déjá paru , sañs que l'auteur oit épuisé la fécondité de son sujet, et qui lui a valu la dé- coration de la Légion d'honneur. Ces travaux si considerables . publio's dans ees derniéres années , disent assez tout l'intérét qu'excite le Rio de la Plata ; mais córame e'cono- miepolitique , ríen ne parle plus haut que les chiíTres de la stalislique , et nous devons citer, dans ce sens , un travail du plus grand interét : c'est la stalislique commerciale du Rio de la Plata , en ce qui concerne le port de Buénos- 21 * Ayres seulement. Cetexcellent travail de M. Bal- caree , 'ancien chargé d affaires de la république de Buénos-Áyrcs á Paris, a élé habilement com- méñlé par l'auteur que nous venons de ciler, M. Calvo, ex-ministre plénipotentiaire du Pa- raguay éh France, qui ■& mis á prolil les loi- si rs de. 1 a d i ploma lié, aíors tou le pacifi que,* dé son gouvernement , pour'édiler 1 histoire la plus complete des relations mercantiles de la Plata , en s'appuyant sur les documéns officiels■ de la France et de la Confédéraiion arpenline. .: i Gn viént dé vóir qué ees dernieps documens ont élé réunis par un éconómiste distingue , M. lía 1 caree ; inais a M.: Poucel restera l'honneur d'avoir inilíé le premier notre pays á l'étude non- séulement physique, mais morale de ees Elals. On a pu voir, dans notre second article, une esquisse des moeurs des Plaleh03, et júger par la de cé caraclére national plein d i séve et d'én- train, qui garde encoré, en dépit des discordes ¡n- térieures.toule la ferce desa primitite na'iveté.et les qualités bien plus que les défauts de la jeu- nesse. L'auteur a complélé cet aperr¿u par un ta- bleau abrégé de la littérature et des sciences naissantes, qui onl déjá inspiré une élite d'écri- vains dignes de trouver de l'écbo en Europe. Comme l'Espagne, ses anciennes colonies ont des orateurs, des poétes, des savans, parlant noble-22 mertt et puremenl la langue de la mére-patrie, piles nomsde deux généraux, Mitre, aujourd'hui presiden! de la république de Buénos-Ayres, et Pacheco, ancien diplómate, sufíiraient pour mon- trftr comment I on peut unir le goüt des lellres á la connaissance des a (Ta i res. Maisi.notre auteur ne sé borne pas a indiquer aux hommes d'élude en Euro pe leurs fréres américains. Espt it prati- que aulanl que judicieux observateur, il s'allache a faire ressortir, des oeuvres méme des écrivains platééns, les tendances que l'Europe doit favori- ser, dans 1'inlerét de sés rápports avec l'Améri- que du Sud; car plus npus aiderons aux progrés de ees jeunes nations par nos sympathies, plus aussi nous fortifierons les idees de droit et de c¡^ vilisation á l'abri desquelles les intéréts du com- mefee general devront se développer. C'est aprés ees prémisses philosophiques du sujet que l'auteur aborde, sanseffort et par une transition naturelle, le récit des épreuves et des malheursdes franjáis qui furent , avec lui , les pionniers de notre civilisalion dans la Plata. Par quelle inintelligence de leurs intéréts les plus évidens, les mémes Platéens dont M. Poucel vient de diré les qualités naliveset de parler avec tant desympalhie, se laissérent-ils entraíner áces hai- nesaveugles, á ees hostilités cruelles conlre nos compalriotes? On se le demande avec tristesse. en 23 lisant les lúgubres pages qui justifient le lilre des Otages de Durazno. M. Poucel répond en expliquant les causes d'un égarement passager. II conduit rapidement le lecteur á travers les trota siécles de la doroinalion espagnole, jusqu'au mo- mént de Témancipalion américaine , et fail voir sans peine comment le despotisme de Rosas, ex- ploitant la passion surexcitée de l'indépendanre, réussitáabuser l'ignorance desgauchos, á dominer par la pópulace les hommes éclairés, et á repous- ser tout contad avec les nalions civilisées, romme un altentat de lése-patrie. On comprend, des lors, comment tant de souiTrances purent étre infligees aux mnlheutéux otages de Durazno, pour le séul crime d'étre franjáis, filáis deux sentimens tout chréliens n'en dpminent pás moins le récit; d'un cote, rimparlialité souvent. louchante de l'éertvain pour sés propres bourreaux ; de l'autre, un noble orgueil de souffrir pour la France et pour la civilisation. Aprés ce long mariyrologe, l'auteur raconte avec la méme simplirité ses propres démarches pendant les quatre années qu'il a employées a réclamer justice en Europe, pour les ótages. La encore.il faut le suivre , de ministére en minis- lére á Haris (1847 a 1851), puis de Parisá Mar- seille, a Venise, á Londres. Partout il revendi- que, non sans succés, les droits de I'humanité, si24 bien associés á ceux de la dignité du notn fran- gís el méme á l'ir.térét general du commerce. Ce di a pitre a pour titre : ¿'Epilogue. Enfin, l'auleur, débarrassé deTétreinte gé~ riáñte de fails qui luí sonl persorinels, se livre tput énlier á la recherche d'une conclusión pra- lique et d'une milité genérale. 11 ne voudrrtil pas que íes lorturés des ólages, ses compagnons d'in- fortuné, restassent stériles pour !'avenir_desvrap- ports de l'Europe avéc l'Amérique; il veut, au contraire, en Taire le gágé d'un méilleur avenir, non^seulement en empéchanl.le ret0ur de pareils malheurs, raais encoré en indiquant les vpies les plus propres á porier le raime, la sécurité et le travail dans ees magnifiques contrées, si long- temps agijléés par les idées démagógiques, si souvent bouleversées par des guerres sans but avouable, sans causé legitime. II serait difTícile de donner a un bon livre un mpilleur but. Nous n'ajouterons qu'undernier mol : D'api és la slatistique de M. Balcarce. analysée par M. Calvo, le cabotage du porl de Buénos- Ayres avec les divers ports fluviaux donne une moyenne de 6,000 tonnes par mois. En évaluanl á un chiíTre égal le mouvement de cabotage des autres ports de la Plata, de l'üruguay et du Pa- raná , ce qui reste évidemment au-de;sous de la 25 réatité, et en doublant res chiffres pour l'entrée et la sortie. on aurait un total d'au moins vingt- cinq mille tonnes par mois , ou soit trois cent mille par an. Or, si deux millions d'habilans disséminés sur 140 mille lieues (marines) car- rees , c'est-árdire moins de \ 5 habí la ns pa r lieue, donnent deja un tel cabotage , quelle ne devien- dra pas son importahee lorsque un jour la lieue carree de la Plata nourrira , comme actuellement celles de l'Europe, 1,500 á 2,000 babitans. Voila les proporlións de l'activité sociale que ees bel les contrées oíTrenl a la legitime ambition des travailleurs , des capitalistes industriéis ou commergans de l'Europe. Et cependant Marseille ne se meut point! Le portdu Havre accapare les cates du Brésil, et celúi de Génes s'empare des Uines etsurtoul des peaux de becuf de la Plata,donl Marseille a eu longtemps le monopole dans tout le midi de l'Europe ! Réveillons done enfin celte torpeur qui lais- serait échapper de nos mains les branches les plus précieuses du commerce. Etudions de plus en plus ees beaux et útiles problémes, auxquels se raltachent le travail et la prospérité de notre vieille Europe. L'auteur l a dit avec aulant de raison que de chaleur :86 « Le jour oü l'Europe aura compris que TA- mérique renferme dans ses solitudes ia solution du paupérisme , pére de ce hideux socialisme qui, de temps á autre , épouvante l'Europe ¿h l'ébranlant, sera un gránd jour pour l'humanilé ' Tout prolétaire de l'Europe pourra se transfor- mer én un propriétaire dans l'Ámérique ; tout consommateur slérile en Europe deviendra pro- ducteür fécond en Amórique. Le bien , en se gé- néralisarit, sera un puissant ágéni dé mofalisa- lion : la possession appellera la coriservation, el les be'nédiclions deTunivers immortaliseront les iniliatcurs de cette bienheuréuse transforma- tion. » B. BODX. 27 Dans ses humeros des 2 et 3 júin, le 'ménoe journal publiail la lellre suivanle : v'' >% LE BRÉSIL DANS LE RIO DE LA PLATA A Monsieur lo Rcdactetir en Ghof d? la (JAZETTE ni: MIDI. Monsieur, Dans votre N° 9914 et sous ce tilre : « L'An- gleterre dans I' Amértque du Sud , » vous avez iraitérune des questions d'intérét general qui affectent le plus la France maritime etcommer- ciale. Quand on a tócu, comme moi, trente-six ans hors de son pays . et qu'on ne connaít de laM Franee que sa grandeur, sa dignité et sa gloire, ■ on est heureux de voir la presse étudier sérieu- sement, et prendre en main l'intérél purdela France á1'étranger.Si la presse savait tout le bien qu'elle pourrait faire au pays, en s'attachanl á rétudeéconomique et commerciale des queslions étrangéres qui touchent á l'intérél franjáis, sa raission serait belle et clle-méme gagnerait en influence tout ce qu'elle ferait gaguer a la France en prospérité. ,; ^ Vous avez heureusement saisi ce beau cóté de la missioñ des journaux , Monsieur , dans la question aussi importante que peu connue des rapporls de l'Europe avec le Rio de la Plata, et je me permets de vous en féliciter dans l'intérél de ees bel les contrées. C'est dans le méme intérét que je vous demande une place, dans.les colorines de votre estimable journal , pour expliquer, d'a- prés ma conscience et mon expériencedes a fía i res de la Plata, les graves et sombres événemens dont ees pays sont actuellement le théátre. Je ne pense pas, en efTet, qu'entre toutes les nombreuses pha- ses critiques qui ont accompagné l'enfanlement decesjeunes nationalilés, une seule ait présente un aspecl aussi décisif que celle-ci pour fonder la prépondérance polilique soit duBrésil, soit de Buenos-Ayres.sur les rires du grand fleuve et de ses affluens. Puissent les détails qui suivent, vous engager á étudier cetle question, comme vous avez étudié la precédeme, et a en suivre les développemens, que chaqué paquebot vous apportera , avec tout I'intérét quecommande l'imporlance des événe- mens, au point de vue de la juste influence que la France doit obtenir dans l'Amérique duSud... ; Dans cet espoir, j'ai l'honneur d'élre, etc. Bbnjámín Poücbl. Les nouve|les qui ont annoncé la capitulation de Montevideo devant l'armée et la flolte du Brésil élaient grnsses de préparatifs bel liquen x pour l'invasion du Paraguay. En envahissant le territoire de Montevideo, le Brésil suil une polilique sceulaire.Cello politique esl née avec la conquéte méme de l'Amérique du Sud, par les Espagnols et les Portugais, qui se sont perpéluellement disputé le magnifique es- tuaire de la Plata. En tournant ses armes contre le Paraguay, le Brésil n'a pas d'autre but que la conservalion de ses provinces de l'exlréme sud-ouest, dont les produits n'ont d'issue que par le Rio de la Plata. Ces deux vérités, developpées á un point de 30 fue general, feraient bienlót comprendre l'im- mense inlérét que renferme cette guerre pour le commerce de l'Europe. C'est en vain qu'on voudrait représenter le Paraguay commc la Chine, de l'Amérique, ainsi qu'il l'était durant la dictature de Francia, jus- qu'en 1843. Le Paraguay d'aujourd'hui n'a d'autre tprt que d'étre plus fort et: plus sage que toules íes républiques qui l-éhtóüréht, el d'étre le seul Etat central donl le Brésil ait á redouter le voisinage, h cause des tendances de sa riche province de Matto-Grosso á s'annexer au Para- guay, pour jouir, comme luí, de la navigalion fluviale jusqu'á l'embouchure dé U Plata. Voijá ipút d'abord le mot de l'éñigme. Ce mot est tellement important pour le Brésil, qu'il de- viendrait pour eet empire une qucstion d'étre ou ne plus étre; car : elle est, pour le gouvernement de Buenos-Ayres, tout une queslion de ¿uprématie. Le Brésil as- pire aux céréalesque luí fournira la zóne tenipé-r rée, le jour oü ¡¡ dominera au Paraguay comme iI domine a Montevideo, parce qu'alors il aura, virtuellement obleini, pour fronliére , le Rio de la Piala , objet de ses convoilises «éculaires. D'aulrepart, Buenos-Ayres qui a subi, á son corps défendanl, la libre navigation des rivieres en 4 853, avait proleslé en 4 843, des la mort de Francia , contre le renouvel.'ement de l'indépen- dance du Paraguay, indépendance dont ce pays jouissait depuis 4 810. de íait. et du inéme droit que s'arrogérent les aulres fraclions des colonies cspagnoles. Mais l'indépendance du Paraguay est, au fónd, l'^néantissement radical des derniers ves;iges du sysléme colonial pour Buenos-Ayres; 534 car, de quel droit cetle opulenle cilé refuserait- elle aux provinces argenlines la libre navigalion du Paraná et du Paraguay, sur les rives droiles, alors que, sur les rives gauches, le Paraguay en jouirait, ainslque les provinces de Corrientes et d'Enlre-Rios ? Or, la libre navigalion pour les provinces argenlines signifie indépendance pour elles comme pour le Paraguay ; done il faul em- pécher le Paraguay d'élre indépendant , afín de mainlenir les provinces argenlines des rives droi- les sous la dépendance de Buenos-Ayres. C'éiáil la le sysléme de Rosas, ét/dáns ce séns, le dileinme est inevitable et fatal : c'est pour- iiuoi, penJanl sepl ans, aprés avoirchassé Rosas; Büenqs-Ayres a lulté conlré la confédéralion argentihe, et la paix mema de 48GO a été bien- io t s u i vi e d hostil i l és n ou \ e 11 es, q u i o ni a hiéné la dissolulion. cu fait; de íá confédéralion, recons- lituée nominalement sous l'auionomie omnipo- tente de Buenos-Ayres. Telle qu'elle existe aujourd'hm, c'est done la fédéralion sous 1"uníté, par le président Mitre, commec'élait l'unité sous la fédéralion, par le gouverneur Rosas. Par une fausse inlelligence de ses inléréts réels, Buenos-Ayres semble condar.née. depuis son indépendance, a voiler sa dominalion dans les pro\inces, pour conserver sa suprématie. Et m cependant pour ceux qui connaissent a fondees pays, ¡1 est cerlain que Buenos-Ayres n'arrivera a la splendeur des deslinées qui luí sont ré- servées, qu'a partir du jour oü. renoncant á une suprématie éphémére dans les provinces du Nord €t de rOuesl, elle aura formé sur son propre ri- vage. desbassins et des docks, qui en feront l'en- trepót obligéde la navigalion fluviale. Tout est la ! Ce jour venu, plus Ies provinces inlérieures auront ouvert de portssurles rives du Paraná et du Paraguay, et plus la prospérité de Buenos- Ayres s'affermira sur les bases d'une large liberté commerciale. ,. ' ..' Pensée généreuse et utile, á laquelle ne s'est elevé encoré aucun des partis belligérans dans lo Rio de la Piala, et qui serait digne de l'inteUi- génce.et des tálens du président Mitre ; car elle ferail de Buenos-Ayres la mélropole de 4 40 mille lieues arrosées parles affluensdu Rio déla Plata, en donnanlá ees vaHm et belles contrées un lien de dépól facile et commode pour leurs pro- duits agricoles qui viendraient , presque sans frais, s'y échanger contre les produits manufac- turés de l'Europe. Nous avons exposé les idées pratiques que su'gére une étude sérieuse des lieux el des fails de la Plata; mais il apparlient surtout aux Cham- bres de Commerce de se livrer á celte étude, afín36 que leur concours écla¡i<5 puisse appeler l'atten- tion dos gouvernemens sur ees queslions loin- laines. Si le canal de Suez a pu érnouvoir l'Europe entiere, c'cst parce qu'ii esl le trait-d*un¡on en- tr'elle et l'Asie. Eh bien ! les a fía i res de la Plata sont aüssi le trau-d'union enlre l'Europe et TAraérique du Sud. Or, l'Europe. surlout lá France, a plus á gagner, commercialement par-: lant, dans les sepl cent, mi lie lieues carrees de 1'Araériqne du Sud , . encoré iníiniment peu peuplée,. qué dans tout l'extrérae Orient 011 les moeurs et les idées d'uné immense population mongolique repoussent les- bienfails de nolre ci- vilisation. En posant au Rio de la Plata l'union moralé et commerciale de rAmériqueduSud avec l'Éurope, au liéu de la placer k Panamá . noús ne croyons pas e'meltre une assertion paradoxale. Nous ba- sons notre opinión st/fMes lois déla géographie, et ees lois veulent que l'émigrant préíére les zónes tempe'rées á la zóne torride ou a la zóne glaciale. Or, avec l'émigration marche lecommerce, en attendant que l'industne la saive. Voilá la raison de notre choix. Les territoires tributaires du Rio de la Plata oceupent loute la zóne tempérée au Sud de l'équaieur, sur une profondeur inégale qúi varic de cent jusqu'á trois cent lieues , de 37 l'Est á l'Ouest. Us forment, au potnt de \ ue géographique , l'un des joyaux du globe , tant pour la salubrité du climal que pour la richesse des produils naturels. II serail done tres heureux pour ees belles conlre'es. raais surlout tres ulile pour l'Europe, de voir le Rio de la Plata entrer enfin dans la voie nórmale d'économie polilique que commande sa géographie, cette puissance in- time et profonde qui détruil tout ce qui a été fait en dehors de ses lois, qui sont celles du créa- teur. ; ■-{^-;^ ~.:..s¿ü;^^ :U:> - :k<::-i Gelte activilé une fois imprimée au mouvement commercial de la Plata, qu'unporterait á Bue- nós-Ayres que chacune des provinces du liltoral e.út un pu. plusieurs ports de débarquement ? Plus celles-ci en ouvriraient, et plus ses ports re- cevraienl. facilemenl les produils des provinces intérieures, et chacun d'eux fourniiait un nou- vel élément au commerce élranger dont les na- vires ne dépasseraient jamáis les bassins et les docks de Buenos-Ayres, étant sürs d'v trouver á transborder leurs chargemens d'entrée sur les alléges remorquables, et aussi de recevoir de ees mi'mes alléges leurs chargemens de retour pour l'Europe. C'est ce qui se passe dans les Etats- Unis. Le jour oü eette polilique sage et généreuse, autant que [profitable, aura prévalu á Buenos-38 Ayres, les provinces de l'intéiieur délivrées de la suprémalie administralive de l'anciennecapitale des vice-roís, n'auronl plus riená redouter pour l'ordre mléneur qu¡ s'aíTermira de loute la pros- perilé cotnmerciale. Alors ees provinces, au lieu de repousser cequ'elles appellent le joug de Bue- nos-Ayres, ne verront plus dans cette belle cité que leur métropole commerciale, comme New- Yorkest celle des Etats du Nord, et la Nouvelle- Órléans celle des Etats du Sud, sans que jamáis ees derniéres villes áient prétendu influencer les Etats rivera i ns, dans laur administration parli- culiére. Pourquoi done Buenos-Ayres n'imilerait- elle pas la sagessede New-York et de la Nouvelle- Orléans ? La prospériié de ees grands centres commerciaux, aváht la guerre civile, ñe dil-elle pas combién Buehós-AyrésYurait á gágner dans la méme voie ? Et l'immense destruclion de ees qualre derniéres années qui a épouvanté le mon- de, est-elle done pire que celle qui afflige l'Amé- rique du Sud,depuis cinquante ans que dure une giierrecivile devenue, pour ainsidire.ende'raique? Nous ne le pensons pas. Cependant les Etats-Unis ont pu suffire á cette horrible consommation d'or et desang, parce que depuis quatre-vingls ans ils avaient obtenu par le travail el par la paix , une prospérité sans exemple dans l'histoire de la formation des peuples. 30 Que le souvenirde tes grandes ruines du Nord ne soil pas perdu pour le Sud de l'Amérique. A Buenos-Ayres íl apparlie.nlde prendre l'ini- tiative de l'or.Jre á introduire, enfin. dans les gouvrrnemensde TAmérique du Sud. et d'y por - ler un grand mouvemeni commercial dont cha- qué province proíitera pour l'exploitation de m richesse lerrilorialp ; mais aucune d'elles n'en retirera , assurémenl, des avantagescomparables á ceux qui en reviendront á Buenos-Ayres. ;Ppür,(faire comprendre l'éiendue de ees résul- tat», il suffit de quelques chiíTres comparatifs, pris dans la slaíistique ofTicielle du port de Bue- nos-Ayres et misen regard de la slaíistique du port de. Marseille. Les chiíTres ont une vertu vierge. . 7. \ ' Le porl de Marseille a éu, en i864, un mou- vement d'eritrée el sortie de 3,099.313 tonnes, el sa population élant de 260,910 habilans, il en est resulté une application d'environ douze ton- nes par tete. Le port de Buenos-Ayres, en 1863, a eu un mouvement d'entrée et sortie de 385,878 tonnes, ce qui représente environ Irois seiziémes de lonne par lele, eu égard á la population évaluée en bloc a deux millions d'habitans, autant qu'il est pos- sible de raflirmer, pour toules les provinces ar- genlines, don'. Buenos-Ayres représente á peu40 prés lout le mouvement commercial potir Te- tra nger. De cette comparaison il resulte que le com- merce de Buenos-Ayres esl á celui de Marseille comme 3 est á 192 ! Et cependant, Marseille s'iriquiéte-t-elle des autres porls de la Medí Ierra née donl on l'appelle la Reine? S'inquiéle-t-elle des canaux, des ché- rains et autres voies de communication que se donnenl les provinces de Tintérieur pour se rap- procher de son port? ;j Eh bien ! alors que les Elals de !a Plata ónl élé dotés par la nalure d'une canalisalion sans pareille dans leglobe, Buenos-Ayres ríe devrait- elle pas bénir ce grand ttienfait qui rend son port rentréppt obligé du commerce des r i vieres-? Le sysléine dé la restriciion a été fatal au re- gí me colonial de l'Espagne ; il a élé-falal a la diclaturc du général Rosas, son représentant le plus puissani depuis l'indépendance des colonies espagnoles, et loutes les tentatives queferait en- coré Buenos-Ayres pour dominer les provinces par la forcé, ne seraient loujours qu'une pále el vaine imitalion du régime colonial de l'Espagne, donl le régne a fini pour ne plus revivre ja- máis ! II est done évident, par l'histoire méme de ees pays, que l'oppression, á tous les degres, a e'té la 41 cause premiére de leurs souffrances, et qu'ds ne trouveront la voic d'une prospérité durable que dans les bienfaitsde la liberté, rendue á l'admi- nislration intérieure des provinces voisines. . De toules ees consideradnos ressert une con- clusión pratique pour les éténemens si graves, si malheureux qui se passent dans le Rio de la Plata. Cette guerre commencée sans équité (et c'est te» que les intéréls de l'Europe se trou\ient lésés sous tous les rqpporls mnrihmes et commer- ciaux), cette guerre ne peut finir que par un dilemme fatal : nouvelle lulte entre le Brésil et Buenos-Ayres, si le Brésil pouvait conquerir le Paraguay ; ou bien lutte entre Buenos-Ayres et le Paraguay, si celui-ci repousse l'attaque du Brésil. " .. En effet, dans la premiére hypolhése, le Brésil ne voudrait pas plus abdiquer la suprématie ma- ritime, dans les eaux de la Plata á lui acquise par la conquéte du Paraguay, que Buenos-Ayres ne pourrail la subir; et, d.ins la seconde hypothése, Buenos-Ayres lutierait á cutrance pour la conser- valion de .«es deux provinces de Corrientes et d'Entre-Rio*, sur la rive gauche, qui la rendent maítressedes etnbouchures du Paraná. Comment douter que le Paraguay, débarrassé du Brésil , cherchát éi s'unir avecCorrientes et l'Entre-Rios42 pour former , avcc Montevideo un seul Eiat mailre des rives gauches , re qu¡ clablirait une sorlc de balancier polilique enlre le Brésil et Buenos-Ayres. Celle unión des rives gauche»1 de la Piala el du Paraná esl une puis«anee géogra- phique qui ira se dessiríahl inieux de jour en jour; la communauié d'intérét a deja éclale lórs- qu'á la vue d'une invasión du territoire raoníé- vúíééñ par l'armée brésilienne , le Paraguay a protesté précisémetit aú nom de 1'equilibre, des Etats de la Plata. Ainsi, quelle que soit l'issué du problérne posé par la guerre acluelle du Brésil conlre le Para- guay, Buenós-Ayres ne saurait en obfenir qu'un seül el terrible résúltal : la guerre ! Envisagée ,aü poiht! de vue amcricain , celte guerre nouvelle perdrail, il ést yrai, le caractére des" miserables lúltcs civiles ; * néés depuis un demi símele , pour prendre les propoitions d'une guerre de nationalités ; mais, au point de vue de l'intérét européen, commercial et maritime, on se demande si la guerre civile , changée en guerre nalionale, ne serait pas également funeste a ees deux intéréts de l'Europe. Poser celte ques- tion,c'est la résoudre. La solulion qui satisferait á la fois tous les in- léréls n'est plus á trouver ; elle esl écrite dans les trailés. La navigalion inlérieure des aflluens 43 de la Plata esl un fait acquis aux patillons de loutes les nations , en verlu du traite de 1853. C'esl aujourd'hui ledroit de lous. ■I En donnant á ce sujet des idees qui sont le fruil de loagues anne'es d'observalion et d'élude, salís égánJ aux aspirations d^s partís qui d¡- visent en a atan t de fractions qu'il apparait d in- dividualilcs hábiles ou puissanles au Rio de la Plata v nous né consultons que le bien de tous, •Américains ét-étrangers, el nous.dirons sommai- rement: 4o Qü'un cohgrés ^ tion non-seulemént du Rio de la Plata, niais pour toutes les questions américaines; qu il soit rom- posé des representans de tous les gbuve'rnemens des deux Amériques et de tous ceux de l'Eurqpe. Plus il sera solénnel, el plus il fera cómprendr.e aux a mi s < I e I' h u ma n i té 1 i ri a n i té de I a ma x i m e Monroe. Plus il sera nombreux. plus il offrira de sures garanties aux Etats faibles conlre les forts. 2° Que, pour la question qui nous oceupe au Rio de la Plata , le Brésil obtienne des grandes puissances mnritimes la séeuritti d'une libre et franche navigilion dans le haut Paraguay et dans le haut Paraná ; car, dés lors, sa guerre conlre le Paraguay restera sans objet. 3°Qi:e Buenos-Ayres, une foissea docks bália et44 ses bassinscreusés le longde son rivage, lesouvre .iii.x conditions les plus modérées ; que toule sa polilique ( et qu'elle n'en ait jamáis d'aulre ) consiste á faciliter l'aclion merontile et marili- me dans le Rio de la Plata ; et ensuite qu'elle laisse faire le temps et l'inilialive des provinces¿ comme elle a dú subir celle de Montevideo et du Paraguay qui, cependant , ont decuplé son pro- pré moüvenient fluvial. Oñ ne cómmánde pas aux conditions de la topographie , et celle de Büenos-Ayres luiassure la prééminence dans les riviéres. Benjamín Poücel. 4o :', ¿íÉlf», Les événemens sont bientót venus confírmer '''^i>:?'s:':'' les prévisions exprimées dans la lettre de M. Benjamín Poucel. A peine achevions-nous de publier cetle lettre, quedes dépéches d'Améri- que annonciient la rupture du Paraguay avec Buenos-A y res, et la coalilion de celle républi- que, ainsi que de TUruguay, avec l'empire du Brésil Ces dépéches sont ainsi conques: i Rio-Janeiro, 10 mai. '■' Le general López , président et dictateur du Paraguay, a fait saisir , sans déclaration de Querré, dans le port d«j l'Assomption ; le va- peur argenlin Saltó. Son escadre s'est emparée dedeux vápeurs de guerre qui se tróüvaient dans le port de Corrientes. La ville de Corrientes a été oceupée, sans résistánce, par 7,000 Para- guayens. «Un envoyédu président Mitrepart pour Lon- dres, dans le but d'y contracter un emprunt. » II s'agit évidemment, pour Buenos-Ayres, de pourvoir aux lrais de la guerre contre le Para- guay et d'écraser ce petit Elat sous les forres combinées de ses trois ennemis. En eflel, une fccconde dépéche, expédice de40 Lisbonne , a l'arrixée du packel anglais de Mo- Janeiro, porte ce qui suil : , « Aprés la saUie du vapeur argentin Salto et loccupalion de Gómenles, Urquiza elCa- cerés envoienl vingl mille houmes contre lé Paraguay. Uo traite' d'a'liance á élé signé en- tre le BrésiL l'L'ruguay ét"Ja Confederalion ar^ genline. » .• .... ,. .v-- . Ñous ne pouvpns encoré expliquer l'iniliative que , d'aprés ees dépéchés, le Paraguay aurail prise contre Buenos-AyícSi Lés Brésiliens , de qui émanent ces-versions, sont iii(éré8i^;T;a*íJc!(s.r présehler :1a rupttire comme un coup de tete de López., Mais d'aulres .avis affirment, contrai- rement a ees dépéchés , que la prise du vapeur Sallo n'a été que í'éffet naturél de la déclaratioii de guerre du Paraguay cohlré Büenós-Ayres, en réponse au refus du général Mitre de laisser passer l'armée du Paraguay sur le leniloire de Corrientes , déclaration qui avait precede la prise du vapeur, lors de l occupalion de Corrien- tes, mais qui n'avait point été publiée á Buenos- Ayres. Quantaux prétendus vingt mille hommes envoyés par Urquiza et Caceres contre le Para- guay, ríen n'esl plus problématique que cetie dépéche de Lisbonne , surtout comme chiffre. Si Urquiza avait pu mobiliserinstantanément une 47 n pareille forcé , il en résulterait qu'il disposerail, dans sa «eule province , d'une armée aussi ronsi- dérable que celle que le général Mitre a deman- dée á la nation toute entiére , c'est-á-dirc aux quatorze p;ovinces argentines. Quoi qu'il en soit , la triple alliance a pour objet avoué d'écraser le Paraguay. ^ Que fallait-i! qu'il fit contre trois?... L'Eúrope répondra-t-elle encoré : qutl mou- rút, comme elle Ta fait pour la Pologne, ou bien, se souvenanl deses intéréts engagés dans la ques- tion déla libre navigation des fleuves du Sud , voudra-t-eile enfín proposer une médialion qui épargnerait une grande effusion de sang et re- melltait ees di vera Etats dans la voie d'une en- tente commercíáíé? . E. RODX. Nous recevons, ál'instant, cede autre dépé- che de París: « R'.o-Janeiro, 10 mai. « La flotte brésilienne s'est dirigée vers Cor- rientes. « La guerre entre le Paraguay el Buenos-Ay- res n'esl pas encoré déclarée, mais on peut la considérer comme certaine.»MÍTwiUe- - ,mP- V M<,rius 0LIVE' rue P,radi»' 68'